
LE COEUR MÉTAMORPHE CHAP.4
Jean-Marc HENRIOT Fondateur de l’Ecole AIDE Psy
Réussir sa vie, c’est aussi se donner les chances d’établir des relations heureuses avec autrui et avec nous-même, et bien vivre nos comportements affectifs. Cela suppose un préalable : décrypter notre complexité psychique et émotionnelle apparente. Notre psychisme est constitué de différentes personnalités. Fruit de nos expériences, il abrite aussi l’enfant que nous étions, l’image de nos parents et des figures marquantes de notre histoire, les rôles que nous avons joués… Le cœur métamorphe désigne la possibilité de gérer cette incroyable mosaïque interne, qui détermine nos attitudes et qu’il nous appartient donc d’explorer et d’organiser, pour évoluer. Ce manuel synthétique et pratique expose des notions psychologiques fondamentales et leurs manifestations au quotidien. Exposés clairs et structurés, exemples, résumés et nombreux exercices nous permettent de découvrir notre boussole interne dont le nord magnétique serait l’équilibre émotionnel. Accepter de se voir tels que nous sommes, c’est saisir une occasion de créativité et d’ouverture humaine.
CHAPITRE 4. CHEVALIER EN ARMURE
La découverte d’une contraception, radicalement efficace, et accessible à toutes, a représenté un bouleversement très profond.
D’un seul coup la femme s’est trouvée libre de choisir ses grossesses et de gérer sa vie sexuelle. A l’échelle de l’espèce humaine, n’ayant jamais connu cela auparavant, il y a eu une véritable révolution, brutale et rapide (30 ans face à des millénaires). Celle-ci a inauguré une série de changements relationnels et sociaux :
- La puissance du féminisme. Mise en cause du « logos » masculin et de la vision du monde qu’il entraîne. Critique du pouvoir mâle. Revendication d’égalité entre les sexes.
- Désir des jeunes femmes de changer désormais les relations à l’intérieur du couple; et désarroi des jeunes hommes devant un rôle conjugal à ré-inventer, différent de ce qu’ils avaient intégré dans leur famille d’origine.
- L’augmentation progressive, régulière et bientôt gigantesque du nombre de divorces, et de familles éclatées / recomposées, ou monoparentales.
Tout reste à faire encore pour que le couple, influencé par ces trente dernières années, trouve un autre type d’équilibre, en intégrant ces revendications féminines d’égalité.
Or, ce qui semble avoir totalement faussé le jeu évolutif c’est la confusion établie entre « recherche d’égalité » (légitime) et « abolition des différences ». La tentation était grande de prôner le neutre, l’androgyne, comme si cette voie de
dé-différenciation représentait la seule issue pour déboucher sur la parité.
Obligés de se contraindre à nier les différences, chaque sexe a payé un tribut important : les femmes en se forçant à agir « comme des hommes », malgré leur inintérêt pour ces attitudes, dans des domaines tels que la sexualité, ou le pouvoir social ; et les hommes en voulant essayer d’être doux, compréhensifs, et pleins de culpabilité face à leurs désirs sexuels. Pensons au grand malaise des hommes suédois, convaincus d’être tous de virtuels agresseurs ou violeurs à mettre sous contrôle maximum (mais se défoulant collectivement, une fois par an, dans la grande chasse à l’élan à laquelle aucun d’entre eux ne supporterait d’être absent).
Peu à peu il semble que socialement nous découvrions l’impasse de cette recherche « d’égalité par annulation des différences ». Il nous faut désormais établir « l’égalité dans le respect et l’acceptation des différences ».
Nous allons reconnaître certaines d’entre elles, au-delà de l’évidence que la psychologie de chacun est forcément influencée par le constat de posséder « un sexe visible et fait pour pénétrer » ou « un sexe invisible destiné à être pénétré » (on a presque l’impression que cette observation morphologique incontestable relève déjà du « sexisme » !!!)
DIFFERENCES HOMMES – FEMMES
Le gros intérêt des approches scientifiques actuelles c’est qu’elles peuvent mettre à jour des aspects qui restaient ignorés jusqu’à présent. Voyons comment se comportent, par exemple, notre cerveau, et nos hormones.
Cerveau
L’I.R.M. permet un bond en avant en donnant la possibilité d’observer désormais le cerveau au cours même de son fonctionnement, et de déterminer quelles sont les zones actives lorsque nous parlons, ou faisons un mouvement, lorsque nous sommes émus, etc. Voici donc, en résumé les grandes constatations qui ont été établies :
- si le cerveau de l’homme est plus gros, le cerveau féminin présente, par contre, la caractéristique suivante : son corps calleux se révèle bien plus important. Du moins est-ce une observation fréquente, mais peut-être ne faut-il pas la prendre comme une conclusion définitive. Le corps calleux est cette partie située entre les hémisphères cérébraux, dont la fonction principale est de favoriser la circulation des informations entre eux deux. Ceci détermine fortement la façon dont fonctionne le cerveau féminin.
- Les hémisphères cérébraux présentent une sorte de spécialisation. Le gauche est plutôt au service de la pensée rationnelle ; ses domaines : logique, raison, déduction, analyse, langage conceptuel. L’hémisphère droit se réserve, au contraire, plutôt le secteur de la pensée émotionnelle, et possède des fonctions telles que intuition, imagination, créativité, perception par les sens, information visuelle.
- Que montrent les observations IRM lorsqu’un homme et une femme sont en train de parler ? L’homme manifeste une activité intense dans une zone délimitée de l’hémisphère gauche (la zone de Broca) cependant que la femme produit une activité diffuse impliquant les deux hémisphères. Conséquence : le langage féminin est non seulement une locution typique de l’hémisphère gauche, mais en même temps une expression liée aux émotions et à l’imaginaire (hémisphère droit). Son langage apparaît donc plus affectif, rattaché à beaucoup d’autres éléments, capable de faciles digressions ou associations d’idées. Alors que l’homme énoncera un discours relativement coupé de l’émotionnel, plus théorique et conceptuel, en rapport avec la zone délimitée à gauche qui se montre en cours d’utilisation.
- D’ailleurs à ce propos, l’IRM témoigne que, généralement, le fonctionnement du cerveau masculin est beaucoup plus compartimenté. On voit d’abord une zone qui fonctionne en priorité, avant de passer ensuite le relais à un autre secteur ; alors que la femme utilise beaucoup plus l’ensemble de son cerveau. Résultat : lorsqu’un homme fait quelque chose, il est concentré, et il préfère généralement terminer ce qui se trouve en cours, avant de passer à autre chose. S’il a commencé à bricoler, écrire, ou regarder la télé, ne vous attendez pas à ce qu’il : 1) se mette immédiatement à faire ce que vous lui proposez, 2) mémorise ce que vous cherchez à lui dire à ce moment-là (même si son « oui, oui » donne l’impression qu’il a entendu) ! Ce n’est pas de la mauvaise volonté (que nenni), c’est que la bonne zone (d’écoute) ne peut pas être activée durant ce temps…
- Quelques autres notations. Les capacités de spatialisation s’avèrent plus développées chez l’homme : son vieil instinct de chasseur primitif, obligé de se repérer finement lors de ses déplacements, se retrouve dans sa capacité actuelle à lire une carte routière…
Enfin on observe un point étonnant : lorsqu’un homme est au repos, tranquille, son cerveau présente à peu près 30 % de son activité électrique habituelle. La femme, dans la même situation, montre un cerveau qui tourne encore presque à plein régime : 90 % de son activité électrique. Peut-être est-elle en train de penser à ce qu’elle a fait, à ce qu’elle va faire, à ce qui ne doit pas être oublié, etc…
Au fond, en conclusion, on pourrait assez bien imaginer que le cerveau féminin n’a pas besoin d’être aussi volumineux que celui de l’autre sexe pour la simple raison qu’avec son gros corps calleux il fonctionne en perpétuelle interactivité entre les secteurs. L’homme, lui, passe de zone en zone. Total : l’un est capable de se concentrer, d’aller jusqu’au bout, de s’abstraire de l’environnement, ainsi que d’autres soucis ou idées. L’autre dispose d’une pensée panoramique, voit les liens entre les choses, déduit très vite ce que tel comportement signifie, est émotive et sensible.
Hormones
Lorsque quelqu’un se trouve sous l’influence d’une drogue ou d’un produit chimique, son comportement peut en devenir fortement altéré. La personne se met à faire et dire des choses qu’elle désavouerait en temps habituel mais qui, sur le coup, lui paraissent légitimes et lui semblent volontairement choisies. L’individu, à ce moment-là, n’est pas « libre », car soumis à cette influence chimique, alors que cependant lui-même ne s’en rend pas compte.
Au fond, quand on siège « à l’intérieur » de certaines conditions et croyances, on ne jouit pas de la possibilité de voir celles-ci « de l’extérieur », et donc de porter un jugement sur elles. Le poisson, dans l’eau, ignore qu’un autre espace puisse exister. Pour lui, l’essence même du monde, sans aucune sorte de contestation, est forcément liquide. Il faudrait se montrer véritablement fou pour penser autrement, se dit-il in petto.
Nous ne pouvons pas prendre conscience de ce dans quoi nous sommes immergés jour et nuit.
Or, vingt-quatre heures sur vingt-quatre se déversent dans notre sang des produits porteurs d’un énorme pouvoir sur nos comportements : les hormones. Nous voilà en permanence « sous influence ». La personne, en face de vous, avec qui vous tenez conversation, se trouve soumise sans le savoir au taux hormonal qui circule dans son sang ; et vous de même… Les drogués parlent aux drogués ! Aucun n’est aussi libre qu’il l’imagine, et tous demeurent inconscients de leur assujettissement à la présence (ou l’absence) de tel produit dans leur corps.
Là encore, bien des différences entre la vision du monde des hommes et celle des femmes vont apparaître.
La testostérone
La femme va recevoir l’influence successive, variée, et à des taux changeants, de plusieurs hormones. L’homme devra principalement faire avec une substance, la testostérone, distribuée à taux régulier, constant et presque sa vie durant.
Or quelle est l’action de la testostérone sur la psychologie (sans parler de la physiologie : poussée des poils et de la barbe, etc) ? Son effet est triple : donner de l’énergie, stimuler sexuellement, susciter l’agressivité.
Une sexologue américaine, désireuse de comprendre l’influence de la testostérone, s’en est fait injecter (à des taux masculins) durant un certain temps. Son témoignage apparaît probant : elle pensait énormément au sexe, atteignait l’orgasme très vite, et se sentait plus agressive. Dans un autre registre, on peut noter que la « castration chimique » consiste à administrer aux détenus masculins une hormone de type féminin (acétate de ciprotérone + Gn-RH) qui a pour effet de freiner à la fois le désir sexuel et l’agressivité. Enfin l’on connaît certain grand nom de la chanson américaine, atteint du SIDA, dont le choix de prendre de la testostérone a été expliqué aux journalistes comme la seule solution lui permettant d’émerger d’un brouillard permanent de fatigue et d’inertie.
A la lumière de ces remarques, on comprendra que les hommes, imprégnés d’un taux régulier de cette hormone, aient tendance à :
* Penser souvent au sexe
* Avoir un certain degré d’agressivité
* Garder une humeur plutôt stable
On notera, pour finir, que cette fameuse testostérone, induisant une appétence sexuelle, existe en petite poussée chez la femme à un moment précis de son cycle : lors de l’ovulation…
Les hormones féminines
Là, nous nous retrouvons loin de toute stabilité. C’est varié, divers, ça se succède, ça diminue, ça augmente… en bref, ça secoue constamment.
L’œstrogène reste quand même présent pendant 21 jours, avec son côté apaisant et son bon effet sur la mémoire ; mais il voit venir s’adjoindre la progestérone pendant la deuxième partie du cycle, avec son style enveloppant. Il y a le petit pic de testostérone vers le 18° jour. Puis, pour finir, la chute des taux d’hormones, pour la préparation des règles.
Ainsi les hormones se succèdent et surviennent par vagues. Guère étonnant si l’humeur féminine est plutôt variable. Pour le corps féminin, la vie se montre plus chahutée, non seulement mensuellement, mais avec ces grands épisodes de bouleversements hormonaux que constituent la puberté, les grossesses, la ménopause. Le sang qui circule dans leurs veines est loin d’être un fleuve tranquille.
Ce bilan hormonal laisse aisément entrevoir que la femme subit une bien moindre poussée intérieure en direction du sexe. De ce fait, déboucher sur une relation sexuelle suppose d’y venir doucement et naturellement, par une préparation progressive, sauf peut-être à certaines périodes.
Or je vois plusieurs patientes se reprocher amèrement d’être « trop lentes » (cependant que, dans le même temps, des hommes viennent me consulter parce qu’ils sont « trop rapides »). Il leur serait utile d’apercevoir qu’elles n’ont pas à se faire grief et qu’il est inopportun d’établir une comparaison avec « les premiers temps », où leur désir était beaucoup plus présent. Le vécu hormonal et psychologique de cette époque se présentait autrement.
Différence de conformation
Enfin, on ne saurait négliger la différenciation sexuelle morphologique qui saute aux yeux (surtout en camp naturiste !)
Le fait d’avoir un sexe visible, ou non visible, a déjà été évoqué dans le chapitre précédent. Ceci marque en profondeur le développement du psychisme, durant l’enfance. Je n’y reviendrai donc pas.
Mais j’ajouterai qu’on trouve de nombreuses équations symboliques autour du thème dedans / dehors. Le sexe dedans, invisible, secret, niché à l’intérieur, évoque l’investissement affectif et psychique sur l’intérieur (de la maison, du cœur), sur la réflexion, la rêverie, l’insight (percevoir ce qui se passe en soi). Le sexe dehors, visible, paraît plus en accord avec un intérêt pour l’extérieur, l’action, une réflexion portée sur ce qu’il s’agit d’entreprendre, et moins d’attention à l’insight.
Pour finir on peut noter que la conformation sexuelle suppose une question à résoudre, posée à chacun des deux sexes :
- Comment désirer « être pénétrée » sans se sentir agressée, intrusée
- Comment désirer « pénétrer » activement, sans se sentir agresseur, intrusif (avec la peur, en retour, en punition, de se voir dévoré par un vagin denté)
CONCLUSION
Sans même parler de leur psychisme, on peut déjà constater que la différence entre hommes et femmes va bien au-delà de la distinction d’aspect physique : leur cerveau est structuré différemment, fonctionne différemment, et le flot d’hormones qui les influence est radicalement antinomique.
Puisque tous ces éléments sont des réalités objectives, la meilleure manière de les traiter reste de « faire avec », plutôt que de les dénier, dans une idéologie confondant « égalité » et « refus des différences ». Les hommes et les femmes ont leurs caractéristiques particulières. Mais chaque sexe risque de voir l’autre à travers son propre filtre. Pour les femmes il subsiste la difficulté à comprendre que les hommes semblent à ce point branchés sexe. Et les hommes ne sont pas en reste quand ils reprochent aux femmes leur émotivité et leurs variations d’humeur. Bref, nous voilà en plein malentendu.
RESUME
Notre grande erreur, suite à la révolution dans l’histoire de l’humanité qu’a représenté l’accès à la contraception, est de confondre recherche de l’égalité entre hommes et femmes, hautement souhaitable, et négation des différences.
Or ces différences s’avèrent manifestes et incontournables. Au delà de la simple différenciation des morphologies extérieures, il faut apercevoir l’impact des trois points suivants :
1) Cerveaux constitués différemment (pas le même poids, pas la même répartition de corps calleux)
2) Cerveaux fonctionnant différemment (par secteurs chez l’homme, en globalité chez la femme)
3) Hormones radicalement différentes, tant dans leurs effets que dans leurs dosages
Le but est donc de faire avec la richesse de ces disparités plutôt que vouloir les nier ou les supprimer.
LE PARCOURS MASCULIN
Faisant pendant au développement de la petite fille, décrit dans le dernier chapitre, voici l’aperçu complémentaire.
Lien avec la mère
Le petit garçon, au contraire de sa sœur, ne ressent pas le manque du parent « oedipien ». Sa mère n’est pas absente, invisible, imaginée. Elle apparaît, au contraire, extrêmement présente et possède beaucoup de pouvoir sur son petit garçon, qu’elle manipule, lave, couche, etc. Ces gestes n’entraînent pas la même résonance, bien entendu, pour ce petit d’homme tripoté par une femme aimée et désirée.
Autant la petite fille éprouvait le « manque » de père, autant le garçon va percevoir le trop « plein » de présence maternelle… dans le cas, si fréquent, où le père ne viendra pas séparer mère et enfant, et s’occuper lui-même, à sa façon plus rude, de son fils.
Que va-t-il résulter de ce lien très fort entre la mère et le garçon ? Deux grandes conséquences
1) Une capacité d’amour énorme, chez l’ancien petit garçon devenu homme. Quand on sait combien un enfant est capable de donner son cœur, sa vitalité, son esprit, de les mettre tout entiers au service du parent bien-aimé, on peut deviner l’intensité d’amour incroyable dont la plupart des hommes sont porteurs.
Mais justement il s’agit d’un sentiment si intense, si fort, si « fou », portant si totalement vers l’autre, que la plupart vont développer des mécanismes de défense afin de ne pas se sentir trop entraînés là-dedans.
Le plus fréquent sera le suivant : après une période de profond rapproché, d’amour très passionné, le partenaire va prendre de la distance, partir, ou devenir plutôt froid et préoccupé. La femme vivra cela comme une douche écossaise : on se sentait si bien, proches, enflammés, il me disait des mots d’amour, et le voilà ailleurs, lointain, presque indifférent. L’explication de premier niveau (« maintenant qu’il est rassasié sexuellement, je ne le vois plus ») est en partie juste, mais très largement insuffisante. Il s’agit d’une alchimie plus subtile, concernant le fait même d’oser se laisser « brûler » d’amour au risque d’y perdre son identité.
Les hommes sont capables de très grandes passions. Beaucoup d’entre elles découlent de cette capacité d’amour fou qui les habite et qui leur fait peur ; ils la dérivent alors sur autre chose.
2) Mais pourquoi donc cette peur ? Voici la deuxième conséquence du lien si fort avec la mère : l’angoisse d’être dévoré, absorbé, envahi, réduit à l’état de pantin ou de joujou à sa maman.
Beaucoup de comportements chez l’adulte vont se structurer en réaction à cette dépendance (amoureuse) initiale. Le petit garçon a vécu plus longtemps sur un mode immature, bien installé dans les jupes à maman. L’homme adulte aura donc des attitudes liées à cette expérience :
* d’un côté, il supportera bien d’être celui dont on s’occupe, ayant une femme pour lui préparer le quotidien (repas, vêtements ; ou dossiers, dans le cas de sa secrétaire)
* mais d’un autre côté il voudra en même temps recevoir les marques de respect qui lui garantiront qu’il n’est pas le petit, diminué, livré. Il faut donc le congratuler, et surtout ne pas le commander trop directement !
* et par ailleurs le voilà pointilleux sur tout ce qui peut lui donner le sentiment d’être envahi ou intrusé dans son univers personnel (lui qui, enfant, n’avait guère d’espace privé, et voyait sa maman « deviner » ses moindres pensées). Il a besoin d’un lieu où se retirer (son garage pour bricoler) ou d’un temps (il est « dans ses pensées », silencieux). Il ne va pas livrer facilement ses ressentis.
Tout ceci le rassure sur le fait que, même lorsque sa partenaire se montre proche et attentive, elle n’est pas pour autant sa mère si puissante.
Ainsi ce « trop plein » d’amour maternel amènera en contrepartie le besoin de l’adulte de s’assurer régulièrement qu’il ne devient pas la chose de l’autre. Ceci se verra dans les plus petits comportements : une femme éprouvera du plaisir, en public, à tenir la main de son homme cependant qu’il craindra inconsciemment de passer pour celui qui s’est fait posséder ; lorsqu’une amie lui proposera une invitation, la femme dira volontiers qu’elle doit d’abord en parler à son conjoint avant de donner une réponse définitive, alors que si un ami téléphone au mari pour lui demander un service à telle date, l’homme, assez généralement, répondra par oui ou par non sans consulter son épouse, quitte à se disputer ensuite avec elle parce que le planning de la famille avait prévu autre chose ce soir là…
Visibilité de son sexe
Pourquoi le petit garçon valorise-t-il à ce point son pénis ? Parce qu’il s’agit là du symbole même de son identité sexuelle. On comprend donc qu’il dote cette partie de son corps d’une telle importance.
Et ce d’autant plus qu’il la pense menacée de disparition, de castration, avant même la lutte oedipienne. En effet, trois éléments vont venir surchauffer cette angoisse de castration :
Le constat de la différenciation des sexes. Pour l’enfant cette découverte entraîne souvent une sorte d’effroi (source de l’intérêt ultérieur le poussant à voir et revoir le sexe féminin). Sa conviction s’établit : si les filles n’ont pas de pénis c’est qu’on le leur a enlevé.
Cette idée trouve son substrat dans l’expérience de la propreté. L’enfant a été contraint d’apprendre, à cette occasion, qu’une partie de lui-même, en forme de boudin, devait être sacrifiée, donnée à la mère qui l’exige, et jetée ultérieurement dans un effroyable tourbillon d’eau destructeur… Au nom de quoi n’en serait-il pas de même pour son petit boudin pénien ? Et si la mère se mettait à imposer qu’il subisse le même sort, et se retrouve ainsi transformé en fille ? Le petit garçon en a des sueurs froides, des angoisses nocturnes et des cauchemars.
D’autant que, assez fréquemment, il lui a été exprimé par les adultes une véritable menace de castration. « Si tu continues à te tripoter devant tout le monde, je vais finir par te le couper » a pu dire un jour la mère ou le père, sous forme demi humoristique.
Ainsi préalablement à la lutte oedipienne avec son père, qui va booster la peur d’être châtré, le garçon se trouve-t-il déjà tenaillé par la crainte de perdre ce qui représente le symbole même de sa propre identité sexuelle.
Quelles conséquences vont en résulter chez l’adulte ?
Surinvestissement des parties génitales. Certes l’homme aime les caresses sur le corps entier, mais il faut très vite que celles-ci se concentrent sur son sexe. Voici le lieu de son corps qui lui donne, de très loin, le plus de plaisir. Il semble que ses récepteurs corporels soient moins importants, peut-être moins nombreux que ceux de sa compagne. Le corps entier reste nettement moins investi ; et la façon d’habiller celui-ci se trouve rarement le souci masculin le plus notable.
Importance des objets partiels. En psychanalyse on parle « d’objet » au sens d’objet d’amour (ou de haine), de personne sur qui se porte l’affection. L’objet total (la personne vue dans son entier) n’est pas acquis d’office. Pour l’enfant le primordial porte d’abord sur des objets partiels : des endroits du corps particulièrement investis et qui, à eux seuls, tiennent la place de l’Autre. Ce sont par exemple les seins (stade oral), les fesses (stade anal), le sexe (stade génital). Progressivement ces diverses parties sont « collées », et la personne est enfin vue entière, investie globalement.
Chez l’homme, la tendance à privilégier une partie de son corps, plus que le corps entier, le portera à placer son intérêt sur certaines parties du corps de l’autre, plus que sur la personne entière. C’est ainsi que, même amoureux d’une femme « totale » (corps-cœur-esprit) il pourra garder une sensibilité à des fragments du corps de sa compagne, et même de toute personne du sexe opposé : spécialement les parties citées plus haut comme objets partiels. Ces « courbes » féminines représentent des sortes de stimuli automatiques. On pourrait presque se demander dans quelle mesure il ne s’agit pas là d’une sorte de schéma instinctuel, inscrit génétiquement. Les éthologues ont longuement montré comment dans toutes les races il existait des stimuli spécifiques, susceptibles de déclencher un certain comportement (par ex. un point rouge sur le bec du petit, qui suscite le comportement de nourrissage chez la mère goéland). Sans doute sommes-nous, à notre insu, soumis à ce genre de schéma. Il semble, ainsi, qu’un certain type d’agencement des traits du visage humain (yeux écartés, large front, petit nez) suscite spontanément un certain désir de maternage. Les fabricants de poupées ont sans doute trouvé leur pâture dans de sobres livres de recherches éthologiques.
En bref… l’homme est réceptif à certains détails du corps féminin.
Ceci n’est un inconvénient que lorsque l’amour n’est pas assez présent et qu’il ne permet plus de lier ces parties du corps à l’ensemble de la bien aimée. Dans ce cas, l’homme risque de trop prendre la partenaire comme une chose, réduite aux portions qui l’intéressent. Rien de plus désagréable, et virtuellement de plus pervers que cette pente.
Toutefois la frontière dans ce domaine est très délicate à cerner. En effet, la pornographie émeut la majorité des hommes (tandis que les femmes se demandent ce qu’il peut bien y avoir d’excitant à voir inlassablement un piston rentrer dans un cylindre). Mais ceci ne permet absolument pas de taxer les hommes de « perversion ». Pour être vraiment pervers il faut que la sexualité soit réduite à une relation dans laquelle l’autre n’est qu’un objet partiel qu’on utilise sans aucune culpabilité, comme une chose. Or il y a loin entre le fantasme, mis en scène par la pornographie, et la réalité comportementale ; et ceci reste la pierre de touche différenciant comportement normal et style pervers… On peut cependant vivement regretter que l’inflation pornographique favorise par trop les stades infantiles et immatures, marqués par les objets partiels. A terme, quelqu’un qui y donnerait trop d’importance plomberait sa propre maturité / maturation.
L’OEdipe
Et puis voilà l’entrée dans l’Œdipe. Une aventure pleine de peur, de frénésie, de haine et d’amour mêlés, dont rendent compte bien des pièces de théâtre. Pourquoi y a-t-il violence (imaginaire) à cette étape ? Pour deux raisons :
- d’une part le père, par sa plus grande absence, peut plus facilement être imaginé vaincu. « Il n’est pas là, j’occupe la place, j’ai gagné ». D’autant que la mère investit d’amour son garçon.
- mais le père revient. Il est là, bien là, et même plus que présent, à ce moment, car sa propre agressivité ne le dispose pas à se laisser facilement écraser. Il s’agit d’un combat entre mâles, dont la Nature nous a montré l’intensité.
Le petit garçon va alors se sentir partagé entre deux tendances surchauffées : la peur et la rage de vaincre.
La peur
Très présente, elle s’alimente à plusieurs sources. Appréhension d’être étouffé, envahi, intrusé par la mère. Terreur de se voir castré, tué, par le père. Hantise de devenir dominé, réduit à rien, manipulé par les deux. Chez l’homme adulte toutes ces frayeurs restent donc présentes a minima (ou a maxima) car l’enfant qui vit en eux les a ressenties. N’oublions pas : rien de ce qui est décrit du vécu enfantin ne disparaît. Cela existe, inconscient la plupart du temps, oublié, mais actif. Relisez donc ce que l’enfant traverse et observez comment cela vous parle des hommes.
Ce petit garçon, tiraillé entre une peur intense et un désir de vaincre de même acuité endure une tension élevée et campe sur ses gardes. Mais comme cette nervosité est tellement forte, il l’évacue par l’agir : il bouge sans arrêt, on le trouve turbulent, il casse par inadvertance, etc. Le petit garçon supporte mal de rester immobile car cette passivité lui fait penser à la mort, à la défaite, à la victoire du père, qui va alors pouvoir faire ce qu’il veut de son enfant. Même s’il ne le formule pas en ces termes, l’enfant perçoit une sorte d’équation entre les points suivants : immobilité – passivité – défaite – mort – être utilisé – homosexualité passive. D’où son style speed et fébrile.
Cependant réjouissons-nous qu’il s’exprime ainsi car cela veut dire qu’il n’a pas renoncé à la rage de vaincre. Devant le conflit interne tellement violent entre peur et désir de vaincre, il pourrait être tenté de renoncer, et d’abandonner la lutte. Il deviendrait alors sans doute un enfant paisible et agréable mais courant fortement le risque d’évoluer en adulte sans énergie, sans ressort, sans capacité à réaliser sa propre vie, déprimé.
Le désir de vaincre
Il aspire donc à triompher. Mais comment avancer dans ce projet sans se laisser paralyser par l’épouvante ? En se constituant une carapace, une armure destinée à contenir la peur et à faire face aux dangers. Ceci va se réaliser sur trois fronts :
- se désensibiliser, moins ressentir, repousser l’émotionnel. Le garçon, au contraire de la fille, pourra ainsi arracher les pattes des mouches ou faire mal à un chat.
- cliver, refouler, segmenter. Un bateau, pour éviter de couler, dispose de compartiments bien séparés : si l’un est inondé, le reste est sauvegardé. Ainsi le danger devient-il moindre. L’homme va donc apprécier tout ce qui relève de la compartimentation, de la délimitation. Il trouvera souhaitable d’avoir des règles, un cadre, il aimera les clôtures , les lois, la comptabilité, une spatialisation organisée « rationnellement », etc. Les bandes de garçons sont hiérarchisées, structurées autour d’une distribution claire des pouvoirs.
Les systèmes de notre environnement, centralisés, pourvus de grades et d’échelons, relèvent ainsi d’une logique masculine.
- se défouler par des combats ritualisés : appétence pour les sports de confrontation, y compris les plus violents (boxe, corrida) et pour tout ce qui met en scène ou en jeu l’action, la lutte, le conflit. Les films catastrophes, le gore, voilà autant de façons de voir à l’extérieur de soi (et donc de libérer provisoirement l’intérieur) tout ce qui relève de la violence et de l’épouvante.
Violence du Surmoi
Le surmoi qui découle de cette histoire de bruit et de fureur se présente comme une image parentale tyrannique et dangereuse, à l’instar de ce que l’enfant imaginait. Ainsi l’homme aura-t-il généralement une instance morale interne peu tolérante. Soit cela restera dans des normes supportables, ce qui est le cas majoritaire, et il n’en résultera qu’une sorte de rigidité psychique avec ses bons et ses mauvais côtés. On ne peut guère se « laisser aller » avec un tel surmoi. Soit ce critique intérieur sera excessivement fort et deux conséquences sont alors possibles :
- carrément le court-circuiter et, dans un style apparemment libre, virer du côté drogue, laxisme, dérive, alcoolisme ; ou bien vers la perversion, l’absence de culpabilité, et la manipulation de l’entourage
- le dévier sur l’extérieur et devenir excessivement sévère, exigeant, intolérant ou même violent
Au total, toute cette traversée houleuse va provoquer fréquemment un style Sois Fort (S.F.), c’est à dire: « Ne montre pas tes failles ou faiblesses sinon tu vas te faire avoir, freine tes émotions car elles vont te faire perdre ta force, face au stress retire-toi dans ton armure ».
RESUME
Voici donc quelques grands traits masculins, assez fréquemment rencontrés, dans les domaines suivants :
Emotionnel et langage
* Compartimenté. Informatif
* Peu d’expression émotionnelle directe. Agacé par les émotions des femmes (domaine dans lequel il aurait besoin d’apprendre)
* Il aime les idées, les concepts. Il est l’inventeur des idéologies
L’action
* Son vécu émotionnel n’étant ni bien verbalisé, ni très conscientisé, il a besoin de soulager sa pression interne par l’action
* Dans l’action son armure lui pèse moins ; il se sent plus vivant
* D’où l’importance de « faire », du résultat à atteindre
Sexe
* Son sexe représente la partie vivante de lui-même, qui sort de l’armure. D’où sa valeur capitale. C’est par lui que l’homme peut se relier à la vie et à l’amour
* Faire l’amour est LE moment de joie par excellence dans son existence. A cette occasion, enfin, tout se trouve réuni : les émotions + l’action + la détente. C’est la conjoncture où il peut éprouver le plus intensément son amour le plus pur et le plus profond pour sa compagne
* On comprendra, dans ces conditions, sa crainte extrême de l’impuissance ou du trouble sexuel. S’il ne consulte que très rarement un psy, par contre le voilà prêt à faire le pas dès que son sexe lui paraît défaillir
Pouvoir
* C’est le grand recours, qui réunit en lui-même beaucoup des points recherchés par les hommes : se sentir respecté, éventuellement admiré, ne pas craindre d’être envahi ou contrôlé, ne pas se trouver impuissant, voir son utilité, avoir une emprise (afin de considérer que lui-même n’est pas celui qui subit l’influence)
* Il aime donc les institutions qui amènent de l’ascendant et des relations hiérarchiques. L’Armée est une invention typiquement masculine.
* Dès qu’un homme se trouve dans un groupe, son radar observe quelles sont les relations d’autorité, quel est le chef, et lui-même va alors se positionner par rapport à ce pouvoir, si possible pour devenir leader
* Il est « censé savoir ». Il a des opinions, et aime qu’on lui demande son avis. Lui-même déteste solliciter de l’aide (plutôt tourner dix fois dans une ville inconnue que s’enquérir de son chemin). Il est sérieux et aime avoir raison
* Conclusion : son goût pour le pouvoir, associé à sa ténacité, à sa capacité de rester concentré sur une seule idée ou une seule action, lui permet d’avoir généralement une position sociale ou relationnelle dominante
QUELQUES CONSEILS
Préalable
Pour nous tous, il est difficile de voir le prix que nous payons lorsque nous pérennisons notre style. Les autres s’en rendent compte, mais pas nous-même. Les femmes trouvent que les hommes ont l’air peu vivants, peu souples, pas très adaptables, prévisibles, parfois un peu robotiques, même si les qualités de ces défauts sont ceux de leur armure : force, stabilité, résistance aux coups émotionnels. Enfermé dans cette cuirasse l’homme imagine mal comment une vie plus riche, plus souple, plus joueuse, plus gaie pourrait être envisageable. Je propose donc aux lecteurs, même si vous vous trouvez très bien comme vous êtes, de considérer qu’il y a peut-être moyen d’éviter ces dix années de vie en moins par rapport aux femmes.
Sans abandonner votre style viril, vous pouvez passer du chevalier en armure moyenâgeux au champion de judo contemporain. L’un se protège des coups par une carapace qui l’enferme ; l’autre utilise la variété des possibles et se sent libre et souple.
Conseils à Sois Fort
1) Se convaincre de l’intérêt qu’on retire lorsqu’on connaît mieux l’émotionnel. Au besoin en vous disant que, si vous l’avez mieux approché et manipulé, ce domaine évitera de venir perturber l’atteinte du résultat que vous cherchez à obtenir. Donc : trouvez les arguments, idées, concepts, qui vous porteront à donner désormais de l’importance au secteur émotionnel.
2) Faites des Stages de développement personnel (Gestalt, Bio-énergie, Rebirth). C’est le chemin par excellence pour vous, car ces thérapies supposent le passage par le corps et l’action. De plus le fait de travailler en groupe permet de percevoir chez les autres des aspects qu’on aurait vu moins aisément en soi-même.
3) Faites attention à vos rêves nocturnes. Le matin, au réveil, ne bougez pas et saisissez la dernière image du rêve que vous étiez en train de faire. Remontez doucement le film à l’envers, en partant de cette image et en allant au début. Faites ensuite défiler le film du rêve, une fois, deux fois, plusieurs fois. Quand vous êtes sûr de l’avoir bien mémorisé notez-letout de suite en détail.
Une fois par semaine, faites un dessin avec des feutres de couleur, qui représentera une scène forte d’un de vos rêves. Rien de meilleur pour vous familiariser avec « le côté obscur de la Force » qu’est votre inconscient ; en effet, le dessin colorié fait appel directement à votre cerveau droit, et à l’enfant en vous.
4) Amplifiez vos émotions, comme proposé à cette page-là, et plus particulièrement la tristesse
5) Développez l’humour envers vous-même. Et en particulier par l’observation amusée des moments où :
- Vous êtes censé savoir… même si, au fond, vous ne savez pas vraiment
- Vous vous accrochez à une opinion, parfois minuscule, comme un chien à son os
6) Enfin, un point assez capital, apprenez à écouter votre femme. Oui, vous croyez avoir déjà essayé, de toutes les manières, et que ça ne donne rien à part des disputes supplémentaires. Et bien c’est qu’il vous manquait le mode d’emploi.
Toutefois, avant de mettre celui-ci en œuvre, il faut fermement arrimer en vous cette détermination à écouter. Comprenez que vous avez tout à y gagner :
a) découvrir tout un monde différent du vôtre. Vous allez désormais devenir le Christophe Colomb du continent psychique féminin
b) enrichir l’évolution de votre couple
Alors voici donc quelques éléments du mode d’emploi. Bien évidemment, tous ceux qui ont fait le GEP reconnaîtront une grande part de ce qu’ils ont appris.
A. Se préparer. Ecouter correctement va être très exigeant pour vous, car il vous faut ne pas réagir à ce qui ressemble à une attaque personnelle (sinon, c’est fichu). Un seul moyen : mettre votre casquette de « soignant émotionnel » et vous convaincre que votre tâche est de l’aider à se libérer de ce qui lui pèse sur le cœur, sans le prendre pour vous, même si elle vous met en cause. Dur, mais faisable. Et terriblement efficace si vous y arrivez. Donc votre tâche : aider le négatif à sortir afin qu’il n’empoisonne plus le cœur de votre compagne, et avec lui votre relation.
B. Pour cela, il faut lui tendre la perche à un moment opportun (où elle aura le temps et l’envie) en lui demandant de vous dire ce qu’elle ressent, ce qui se passe pour elle en ce moment. Si elle esquive (« Rien, rien ! ») déployez vos antennes afin de percevoir ce que cela veut dire. En effet « rien » veut souvent dire « quelque chose mais si je commence à le dire j’ai peur qu’on se dispute, et puis de toute façon tu ne m’écouteras pas ». Si vous sentez que derrière ce rien il y a quelque chose (le ton de sa voix vous l’indiquera) continuez bravement, même si, en faisant cela, vous savez que vous allez vers du gros temps.
C. Sachez que le négatif doit absolument être exprimé (colère, dépit, déception, ras le bol, amertume, fatigue, etc, etc). Au GEP, pour les entretiens d’aide on rappelle le leitmotiv : « le négatif d’abord ».
Ne cherchez surtout pas à empêcher ce négatif. Un bon soignant favorise l’écoulement d’un abcès car il sait qu’ensuite la santé reviendra. Or vous êtes, ne l’oubliez pas, à ce moment-là exclusivement un « soignant émotionnel ».
D. Si les faits qu’elle vous exprime vous paraissent carrément exagérés ou même totalement faux… aucune importance ! ! Ce qui compte c’est la manière dont votre femme vit les choses. Ce qui vous importe donc ce sont ses vécus et non les faits. Au GEP, autre leitmotiv, on se rappelle mutuellement qu’il faut écouter « le vécu et non les faits ».
Si elle vous dit : « Je fais toujours tout et tu ne t’occupes jamais de rien » ne cherchez pas à lui montrer en quoi cette assertion est exagérée. Dites-lui plutôt : « Tu as le sentiment d’avoir un fardeau trop lourd, et tu m’en veux »
Rappelez-vous que les hommes aiment avoir un langage délimité et informatif, alors que les femmes parlent avec leurs deux hémisphères cérébraux, et donc sur un mode qui n’est pas strictement informatif… (litote)
E. Continuez à la soutenir ainsi dans son expression, en reformulant ses ressentis (« Tu en as marre, tu es déçue, tu es fatiguée » etc) de façon à lui faire comprendre que vous l’accompagnez. Au besoin, ponctuez par des « Hum, hum » ou des « Je comprends »
F. Pour finir ne cherchez pas à lui donner vos solutions ( du style : « il n’y a qu’à embaucher une femme de ménage »), ni vos idées, votre point de vue, vos interprétations, vos jugements.
Abstenez-vous detoutce qui vous vient à l’esprit pour « l’aider », sinon c’est là que cela dérapera. Contentez-vous de lui dire quelque chose comme : « Je comprends mieux ce que tu vis et je vais y réfléchir »
G. Peut-être, à ce moment là (suivant que votre femme se détend ou non), pourrez vous alors enlever votre casquette de soignant émotionnel et l’embrasser tendrement. Mais ne forcez rien (ni vous, ni elle) ; restez attentif à ne pas vous énerver et à vous sentir bienveillant.
Quelques bonnes séances de cet ordre devraient sérieusement vous apprendre la souplesse du judoka, plutôt que la rigidité du chevalier à la triste figure.
Conseils aux conjointes de S.F.
1) ne lui proposez pas de « communiquer », dans l’espoir qu’il évolue. Essayez de faire avec son style. Plus vous l’accepterez tel qu’il est, dans son armure, plus vous lui donnerez des chances de quitter celle-ci.
Relisez la Fable de La Fontaine qui met en concurrence le vent et le soleil. Tous deux se sont lancé le défi de faire enlever sa cape à un voyageur. Le vent tempête de toutes ses forces… en vain, car le voyageur resserre encore plus son manteau. Le soleil ensuite enveloppe chaleureusement notre homme qui, bientôt, de lui-même, enlève ce vêtement si encombrant.
2) Laissez lui le temps de savoir ce qu’il ressent. Si vous lui demandez ce qui se passe en lui, attendez-vous à ne recevoir une vraie réponse détaillée que bien longtemps après (parfois le lendemain). Il faut qu’il puisse se retirer en lui-même et dérouler peu à peu le fil émotionnel pour arriver éventuellement à savoir ce qu’il sent.
3) S’il cherche à réaliser de grandes choses « à l’extérieur », s’il s’investit massivement dans son travail, pensez que peut-être il a besoin d’être un peu plus reconnu « à l’intérieur », c’est à dire avec vous et dans sa famille. Félicitez-le donc pour les petites choses qu’il réalise auprès de vous (encore !!…)
4) Sexuellement, il fonctionne à l’inverse de vous. Vous aimez être tendrement enlacée plutôt que tripotée à des endroits précis ; lui aime le contraire : qu’on commence par la partie qui lui importe, quitte à élargir ensuite à des jeux englobant plus largement le corps entier.
L’humour anglais est bien connu. Il nous dispense le proverbe suivant : « Take him by the balls ! ». Je vous laisse le soin de traduire cette conclusion.